"Qu'il s'agisse de religion ou de politique, et quel que soit le niveau de culture, l'esprit de conversion a existé de tout temps. 
Les organisations et associations de toutes sortes, religieuses ou économiques, prospèrent (et leurs chefs avec elles) en maintenant l'homme à l'intérieur du cadre idéologique qu'elles lui proposent. Il y a là une exploitation mutuelle. 

La vérité est en dehors de tous les cadres, de toutes les craintes et de tous les espoirs. 

Si vous voulez connaître le suprême bonheur de la vérité, vous devez rompre avec toutes les cérémonies et tous les cadres idéologiques."

Jiddu Krishnamurti

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«Qu’est-ce qui est nécessaire sur le chemin ?

De connaître et de pratiquer des exercices respiratoires comme les yogis ?
D’apprendre et de réciter des mantras ?
De pratiquer des rituels seuls ou dans une communauté ?

Il est dit que nous pouvons ou non prendre les transports en commun et choisir plutôt le bus, ou le train, ou l’avion. Il paraît que toutes les voies mènent au but.

Mais nous sommes troublés par des petites questions pratiques :

là maintenant, me manque-t-il quelque chose pour bien cheminer ?

Pour ne pas trop me tromper, puis-je trouver des dénominateurs communs ou des techniques de base éprouvées communes à toutes les voies ?

En interrogeant des moines chrétiens en France, des moines zen en Orient, des maîtres tibétains, des soufis et des sages hindous, j’ai ainsi retrouvé deux dénominateurs communs à toutes les voies spirituelles.

Le premier est ce que nous appelons la VIGILANCE et le second est l’ÉQUANIMITÉ associée au travail sur les émotions.

La vigilance correspond à l’absorption consciente de différentes nourritures au moment où celles-ci font monter en nous désirs, peurs, amour ou haine, toutes les réactions habituelles. Tenter de devenir plus conscient autorise une autre manière de digérer et d’assimiler ces nourritures. L’énergie ainsi accumulée sera plus raffinée et ceci ne peut s’opérer quand nous sommes identifiés à nos émotions.
Cela se traduit par de nombreuses expressions dans toutes les traditions : « cultiver le rappel de soi », « présence à soi-même et à Dieu », « le cœur avec Dieu et la main à l’ouvrage », …

Tout peut se résumer par un « Soyez attentif pour ne pas sortir de vous-même ».

Grégoire le Grand dans ses Dialogues sur Bernard de Clairvaux dit ceci :
« A chaque fois qu’une préoccupation trop vive nous entraîne hors de nous, nous restons bien nous-mêmes. Pourtant, nous ne sommes plus avec nous-mêmes : nous nous perdons de vue et nous nous répandons dans des choses extérieures. Par contre, St Bernard, cet homme vénérable, habitait avec lui-même : toujours attentif à veiller sur lui, se tenant constamment en présence de son Créateur. S’examinant sans cesse, il ne laissait pas se distraire au-dehors le regard de son âme. »

L’enseignement du Bouddha insiste également sur la nécessité de l’attention : « Ceux qui sont attentifs ont déjà la vie éternelle, ceux qui ne sont pas attentifs sont déjà morts. »

Il y a assez de matériaux sur ce thème dans toutes les traditions pour constituer une immense anthologie. Ce thème met en opposition deux choses : d’un coté, une vie « ordinaire », où le sujet est absorbé par l’objet et où aucune discrimination ne s’accomplit entre le « spectateur » et le « spectacle », entre le « témoin » et le « phénomène » ; d’un autre coté, une vie « consciente » où le sujet ne se confond avec rien d’autre que lui, où il ne s’identifie à rien de ce qui l’entoure (sensation, émotion, pensée).

Le second dénominateur commun consiste à avoir une attitude radicalement nouvelle en face des mécanismes d’attraction et de répulsion, du « j’aime, j’aime pas », « j’ai envie, je n’ai pas envie » autrement dit en face de nos émotions.
Que vous l’intituliez « soumission à la volonté divine » (fiat voluntas tuas) ou acceptation de « ce qui est », il s’agit toujours d’une attitude très inhabituelle qui tranche radicalement avec le monde ordinaire. Cela résulte d’un travail pour effacer les émotions et s’obtient par la compréhension même du mécanisme des émotions et de l’adhésion au réel (ce qui renvoie à la Vigilance). Vous ne trouverez pas un enseignement où ce sujet n’est pas abordé.

Pour prendre un exemple, en sanscrit, le mot klesha signifie souillure. Quand vous regardez la description des souillures, elles correspondent toutes à des émotions (avidité, colère, jalousie).
…
Qu’est-ce qui fait qu’un jour le Chemin produit des fruits durables ?

L’absorption CONSCIENTE des nourritures.

Par l’accumulation des énergies grossières et leur raffinement en nous, un changement qualificatif peut s’opérer un jour. A chaque fois que vous convertissez une attitude négative en attitude d’ouverture, vous faites un pas dans la direction de la cristallisation de votre corps subtil. Soyez-en sûrs.
…
Le Chemin consiste à se libérer de lois auxquelles nous sommes soumis et que les sciences humaines étudient.
…
Deux affirmations sont conjointement vraies : d’une part, nous sommes nus sous nos vêtements, nous sommes déjà le Soi, celui qui n’a pas besoin d’être créé puisqu’il est là depuis toute éternité ; d’autre part, nous cherchons comment faire, nous cherchons le moyen de nous établir dans le Soi, de devenir l’instrument de l’existence (de la volonté divine). Construire un organisme autonome sous la forme d’un corps subtil grâce au renforcement de sa vigilance et au travail sur les émotions est ce moyen. Ces deux dénominateurs communs sont les deux thèmes sur lesquels il faut insister sans cesse. Chaque fois qu’une situation se présente, revenez à l’adhésion, à la non dualité dans l’instant, être « un avec » la réalité telle qu’elle apparaît.

Vous constaterez que vous ne possédez pas cette structure et que vous êtes toujours à la merci des émotions et du mental. Vous n’êtes pas sûrs de vous : est-ce que je ne risque pas de souffrir encore, d’avoir peur ? Vous êtes plus ou moins avancés sur le Chemin. Vous avez franchi certaines étapes, mais vous savez que votre structure n’est pas cristallisée. Elle n’est qu’ébauche et vous n’êtes pas autonomes. Et puis, un jour, au contraire de la veille, vous ressentez cette autonomie. Quelque chose a vraiment changé. Vous ne fonctionnez plus comme avant. Les vieux mécanismes ne se produisent plus.

L’existence vous ordonne :

« Sois plein de joie!»

Vous n’êtes plus obligés d’obéir … en vous contraignant à avoir de la joie.
L’existence vous ordonne :

« Tombe amoureux »
Vous n’êtes plus obligés d’obéir … en  tombant amoureux.

L’existence vous ordonne :

« Sois furieux »
Vous n’êtes plus obligés d’obéir … en vous mettant en colère.
…
Le mental a perdu son pouvoir.

Il n’y a plus de rechute à craindre.

Vous réalisez que vous n’êtes plus un esclave.

La cristallisation est achevée. »

Arnaud Desjardins

"L'audace de vivre."

"Même lorsque la Conscience s’est voilée d’un habit de croyances, de doutes, de peurs et de sensations, le goût de sa propre nature illimitée, libre et sans peur est inscrit dans chacune des expériences, et ce goût est souvent expérimenté comme une sorte de nostalgie ou de désir profond."

 Rupert Spira