Fénelon, l’Archevêque de Cambrai, a émis le seul commentaire acceptable sur cette situation : « Il n’est pas d’illusion plus dangereuse que les fantasmes par lesquels les individus s’emploient à éviter l’illusion. » En conséquence, toute quête, spirituelle ou autre, est en définitive dépourvue de sens ; et considérer l’État de Conscience Ultime comme un état de conscience altéré est absolument inacceptable. Je ne nie pas le fait qu’il soit possible d’accéder à quelques états de conscience altérés miraculeux — il est possible d’y accéder pour la simple raison qu’ils sont partiels et exclusifs et qu’ils peuvent donc être développés et perfectionnés. Mais quel rapport y a-t-il entre cela et l’État de Conscience Ultime englobant tout ? Vous pouvez sans conteste vous entraîner à atteindre les états alpha ; vous pouvez développer votre aptitude à y parvenir à l’aide d’un mantra ; vous pouvez apprendre à interrompre l’émergence de toute pensée — mais uniquement parce que ces états de conscience sont exclusifs et partiels, différents d’autres états, et que pour cette raison il est possible d’accorder sélectivement plus d’attention et d’efforts à l’un qu’aux autres. En revanche, vous ne pouvez vous entraîner à accéder à cet état de conscience que vous n’avez jamais quitté et qui englobe tous les états de conscience possibles. Il n’existe pas d’endroit en dehors de l’État de Conscience Ultime où vous puissiez vous situer pour vous entraîner. Je vous propose de prêter une fois de plus attention aux propos de Huang Po :
Le Bodhi (la connaissance de la Nature de Bouddha) n’est pas un état. Le Bouddha ne l’a pas atteint. Les êtres sensibles n’en sont pas dépourvus. Il ne peut être atteint par le corps ni recherché par le mental. Tous les êtres sensibles sont déjà de même forme que Bodhi. Si vous êtes convaincu que tous les êtres sensibles ne font déjà qu’un avec Bodhi, vous cesserez de penser que Bodhi est un but. Peut-être avez-vous récemment entendu d’autres personnes parler d’« atteindre le Mental-Bodhi », mais il est permis de considérer qu’une telle formulation est en fait une manière intellectuelle de chasser Bouddha. En suivant cette méthode, vous PARAISSEZ accéder à la Bouddhéité ; si vous consacriez des éons et des éons à cette quête vous n’atteindriez que les Shabhogakaya (états de félicité) et Nirmanakaya (états transformés). Quel rapport cela aurait-il avec votre Nature de Bouddha originale et réelle ?
Extrait des Trois yeux de la connaissance de Ken Wilber, éd. Almora
Extrait de l'excellent site de José Leroy:
http://eveilphilosophie.canalblog.com/