"Revenons sur le concept "il n'y a personne".
Le paradoxe est le suivant : La constatation du fait qu'il n'y a personne est faite par qui/quoi ? Parce que ce serait complètement stupide de faire semblant que c'est impersonnel et que c'est la vie qui parle, qui affirme, qui déclare qu'il n'y a personne. La vie n'est pas un sujet, c'est un objet, c'est l'ensemble des choses vécues et de ce qu'il se passe naturellement, c'est de l'énergie pure, c'est toujours appréhendé par un sujet qui vit la vie, la voit, l'explore et en jouit ou pas. Il y a donc bel et bien quelqu'un qui affirme qu'il n'y a personne...
Ce ne peut pas être quelque chose, Cela, Soi, ou n'importe quoi du genre qui affirme qu'il n'y a personne, car pour simplement le constater et le dire, ça prend un sujet !!! C'est ce que l'on dit dans le club des "éveillés", il n'y a personne, mais bien que ce n'est pas faux, ce n'est pas complet.
Le fait tout simple qu'il n'y a personne, cette constatation vécue de première main, le fait de le vivre apporte automatiquement l'intime et très vivante sensation de la Présence à Soi. À soi-même !! Non pas à soi en tant que quelque chose d'extérieur qui me fond dessus, à soi-même en tant que sujet ultime, non entaché et non identifié par les mécanismes et conditionnements inventés qui composait la personne, celle-là même dans la constatation du "il n'y a personne".
Dire "il n'y a personne" et en rester là sans s'apercevoir qu'il y a bel et bien encore un sujet "je" pour exprimer cela, c'est être scotché dans une dimension de conscience ultra froide, là où il n'y a plus d'interaction avec la matière, avec le relatif, avec ce qui compose le vivant....et pour l'avoir vécu, cela peut devenir très drastique et demander une énergie énorme pour maintenir cet espace où un retrait d'avec le monde et tout ce qui compose le JE dans toutes ses facettes est maintenu. Il est même possible d'endormir en soi la sensation intime du vivant, d'être sujet premier, unique et individuel.
Être sujet JE, se reconnaissant et vivant intimement la présence consciente à soi-même n'a rien à voir avec le je/moi psychologique qui lui s'attribuait une vie qu'il voulait façonner à sa manière. C'est cette partie là qui disparait dans le "il n'y a personne", et non pas le sujet pur Je, qui lui descend directement de la Source qui ne pouvait faire autrement que de s'extraire d'elle-même pour expérimenter.
Plus ce Je ultime est reconnu comme étant très intime et nul autre que Moi (je met la majuscule pour discerner d'avec le moi psychologique), plus la Présence est connue comme étant nul autre que Moi. Moi est impersonnel mais il existe, il est ben et bien là vivant ! Si toute intimité d'avec soi disparaissait suite à la réalisation qu'il n'y a personne, il ne resterait que des robots mécaniques, des corps avec aucune constatation possible de son fonctionnement. Il ne resterait que des robots qui ne pourraient même pas affirmer qu'il n'y a personne ! Je suis étonnée de voir à quel point ce paradoxe est non seulement mal compris mais combien est véhiculé de travers ce concept de "il n'y a personne". Le chercheur reste avec une attente fébrile de disparaitre mais aussi une grande peur de ce qu'il deviendra, convaincu que l'état de cette réalisation est tellement impersonnelle que toutes sensation d'intimité et de présence à soi disparait. Y a de quoi avoir peur ! ....il est d'autant mélangé que par la suite on lui parle de Présence, de Soi, etc...comment conjuguer le fait de devenir complètement impersonnel avec le fait de vivre comme Sujet ultime ? se demande t-il.
Le sujet ultime Je ne pourra jamais être à part de ce que je suis intimement....à méditer par tous ceux qui se croient et se sentent disparus dans un no man's land consciemment froid au point de pouvoir affirmer qu'ils n'existent pas sans ressentir qu'ils doivent bien pourtant être le sujet de première main puisqu'ils sont capables d'affirmer ne plus exister...:)
Christine Morency
https://ecritsdabsolu.blogspot.fr/