"La fugacité est une chose étonnante. Vous pouvez la comprendre conceptuellement et vous dire : « OK, tout est un peu comme un film ! Et alors ? ». Oui, mais cela ne vous libère pas en fait, parce qu’à la prochaine occasion, vous êtes à nouveau complètement pris dans ce qui arrive, complètement embarqué dans le film et vous jouez compulsionnellement votre part, votre rôle, votre schéma comportemental conditionné, vos pensées conditionnées, vos réactions conditionnées. Un moment, vous pouvez vous dire intellectuellement que c’est comme un film et vous répondez au téléphone : « Quoi ? ». Vous jouez à nouveau votre rôle alors même que vous considériez la chose. Vous avez subitement oublié que c’était un film. Et c’est seulement quand rien ne se passe, quand le téléphone ne sonne pas, quand il n’y a personne à votre porte que vous pouvez tranquillement vous asseoir et déclarer : « Oui, tout est comme un film ». Il doit donc y avoir une compréhension plus profonde qui va au-delà de la conceptualisation et c’est l’ouverture de ce que j’appelle parfois la conscience-espace en vous quand vous contemplez véritablement l’impermanence de toute chose, non pas seulement comme une idée intellectuelle avec laquelle vous êtes d’accord, mais en la regardant sans les concepts, en allant au-delà des concepts. Faites face directement au fait de l’impermanence, par exemple, lorsque l’un de vos proches décède, en restant assis près de son corps un bon moment. Vivez alors les émotions et allez peut-être au-delà des émotions. Vous pouvez également aller voir le corps de toute personne décédée. En Occident, on ne peut pas faire ça. En Inde, c’est possible. Vous ne pouvez pas aller quelque part et dire « j’aimerais voir un corps mort ». On ne vous le permettra pas. En Inde, vous vous asseyez simplement à certains coins de rue ou certains endroits et vous voyez un corps amené sur le bûcher funéraire. Et vous pouvez simplement rester assis là. Et ce qui sera plus puissant, c’est de voir le corps mort en train de brûler. Sans aucun concept, faites face directement au fait... Cela ouvre la conscience-espace, la profondeur en vous où vous commencez à vous désidentifier de la forme. Quand vous voyez en face de vous une forme qui se dissout, que vous ne conceptualisez pas et que vous y faites simplement face, c’est vraiment incroyable !"
Eckhart Tolle
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